Annie Esther Cohen

 

Je suis née à Tunis dans une famille juive respectueuse des traditions …et dans une famille juive, pas question de parler de Jésus . D’abord qui était ce ? Celui qui pendait sur une croix en or au cou de mes copines de classe ou celui qu’on accrochait au fond de la classe de l’école de soeurs que je fréquentais comme beaucoup de petites filles juives de bonne famille ?

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Mon grand-père paternel était un homme très sage et très pieux qui mettait ses Téfilines tous les matins et qui ne manquait aucun des rendez-vous journaliers avec D… au travers de la lecture des psaumes et des nombreuses prières à la gloire de l’Eternel. Chaque shabbat, nous nous réunissions chez mes grands-parents, avec mes cousins et cousines, en grand nombre, autour de cette table merveilleusement garnie par ma grand-mère, femme très pieuse également. Je me souviens aussi de la fête de Pourim où nous tapions du pied à la lecture du nom de Haman dans la Méguila et là …Oh miracle ! mon grand-père nous demandait de faire du bruit, beaucoup de bruit… A Pessah , il achetait un agneau qu’il nourrissait plusieurs jours avant la fête, jusqu’à ce que le Shohet vienne le sacrifier. J’aimais ce petit animal, je jouais avec lui, le caressais… mais je savais qu’on devait le tuer car c’était D… qui nous l’avait demandé. Mais qu’est-ce que cela pouvait me faire à moi, ce que D… avait demandé ou non ! Je trouvais mon grand-père intraitable quand je le suppliais de ne pas sacrifier ce petit animal si adorable et attachant. Aucun enfant ne devait être présent lors du sacrifice. Et pourtant un jour j’étais là. Je n’ai rien vu mais j’entendais, puis je n’entendis plus rien. J’ai juste vu mon grand-père ressortir de la pièce avec une bassine pleine de sang dans laquelle il trempa sa main, qu’il apposa ensuite sur le montant de la porte. Je n’oublierai jamais cette scène. Que signifierait-elle pour moi plus tard ?

Bien des années après j’ai eu contact avec des chrétiens qui essayaient de me faire croire à la “Bonne Parole”. Leur langage m’était totalement étranger et plus ils essayaient de me convaincre de leur idéologie et plus ils m’agaçaient. J’avais l’impression qu’on cherchait à me “récupérer”, à me faire subir “un bourrage de crâne”. J’étais polie, je les laissais parler mais leurs histoires ne m’intéressaient pas. Je ne comprenais rien, et je ne voyais rien qui pouvait me concerner. Le langage hébraïque et le langage chrétien me semblaient tellement éloignés. En fait, le fond est le même, mais, que la forme est différente ! Ainsi, rien dans leurs propos ne m’attirait. Bien sûr, j’ai été invitée à droite et à gauche ; on m’a inondée de tracts où l’on parlait de Jésus le Juif mais dans une “ langue ” chrétienne qui faisait deux avec ma “ langue maternelle ” ! Puis un jour, après le énième tract reçu et jeté, une amie chrétienne m’a donné une invitation pour la fête de Hanouka organisée par des Juifs croyants en Jésus. Je l’ai prise poliment, je l’ai jetée à la poubelle et, sans raison, je l’ai récupérée. Je me suis mise à lire ce document qui pour la première fois me parlait dans un langage familier. Je décidai de me rendre à cette invitation avec toute ma famille. Et à ce moment-là, j’ai entendu le nom de Yechoua, nom hébreu de Jésus, qui signifie “Dieu sauve”. Enfin, je sentis qu’on parlait de l’un des nôtres.

“Yechoua” : Ce nom hébreu a tout changé pour moi. Enfin s’ouvrait devant moi un chemin superbement éclairé. Ma vie, mon coeur, tout a basculé en ce jour de Hanouka, fête des lumières. La lumière avait jaillit aussitôt et pourtant, je cherchais à résister à cette divine révélation qui relevait d’une culture si différente de la mienne : Yechoua était bien le fils de D…, le Sauveur que le peuple juif attendait. Tout se confirmait : les évangiles étaient comme un transparent que je pouvais poser sur la Bible Hébraïque.

Oui, Yechoua était un bon Juif, un très grand sage aux enseignements fascinants. Un remarquable Berger qui appelait le peuple à revenir à D…, à donner son sens fondamental au terme Téchouva, “se tourner vers D…” et non, “changer de religion”. Oui, moi qui n’étais qu’une “Juive des grandes fêtes”, je suis revenue à la Torah et aux commandements que D… a donnés à son peuple. “Je ne suis pas venu pour abolir la Torah mais pour l’accomplir”, a dit Yechoua. J’ai simplement “accepté” ce beau cadeau que D… m’a offert et il me l’a offert parce qu’il m’aime comme un père aime son enfant. De plus, je n’ai plus peur de la mort et je vis dans une certaine sérénité, une espèce de certitude inviolable et je me sens poussée à donner aux autres de cette sérénité et de cet amour dont je déborde. Aujourd’hui, je suis une femme heureuse et épanouie bien qu’on me taquine parfois gentiment au sujet de ma foi.